Lendemain de blessure...

Crews, qui devait prendre son service, était parti plus tôt que d'habitude, pour prendre des nouvelles de Reese à l'hôpital. Il était un peu tôt, donc il supposa qu'elle dormait encore et demanda des nouvelles au médecin qui lui précisa que de toute façon, la jeune femme était réveillée maintenant car l'infirmière devait tout juste venir de lui faire une prise de sang pour vérifier si tout allait bien. Il pouvait donc passer sans crainte de la réveiller.

Il alla donc voir son équipière.

Bonjour. Je peux ?

Oui, bien sûr entre.

Audrey avait eu une nuit un peu dure. Les premières heures, avec la fatigue dûe à l'intervention, elle avait dormi comme un bébé mais elle s'était réveillée vers 5h une fois la douleur totalement réveillée. Comme elle ne pouvait pas prendre d'anti - douleurs, la fin de la nuit avait été longue.

La jeune femme avait pensé que la journée, avec l'agitation autour serait mieux, mais tout compte fait, rien de tel qu'un peu de visite pour se changer les idées... Elle ne s'était pas attendue à ce que Charlie passe avant de prendre son service, mais c'était une bonne surprise, tout compte fait.

Il entra et s'assit sur la chaise en plastique, à côté du lit.

Alors comment tu te sens ?

Pour avoir été un flic en prison, il savait que les lendemains de blessures n'étaient pas des plus agréables, surtout dans le cas de Reese qui n'avait pas droit aux anti - douleurs.

Ca va.

Elle sourit un peu, comme pour appuyer ses dires.

Tu es sûre ? Tu as l'air un peu fatiguée. Bon, ce n'est pas flagrant, mais tu as le même air que quand on passe trop d'heures au bureau.

Il essayait, en adoptant son phrasé un peu particulier d'obtenir la vérité.

Hum, tu sais parler aux femmes, toi... Et maintenant, à chaque fois que je ferai des heures sup' je vais me demander si j'ai l'air d'avoir pris une balle quelques heures auparavant. remarqua Reese, jouant un peu à lui renvoyer l'ascenseur pour ses réponses étranges.

Je ne me débrouille pas si mal que ce que tu sembles croire... On peut le mettre dans cet ordre, c'est vrai. Mais la conclusion est la même. dit Charlie.

En effet, il en revenait toujours au fait qu'elle n'avait pas dormi.

Si tu le dis... On ne peut donc pas te piéger, toi ? questionna - t'- elle, une nuance d'amusement dans la voix. Je manque un peu de sommeil, disons que les premières heures pour dormir, ça allait, mais ensuite, à l'hôpital, la nuit, c'est plus en mouvement que ce qu'on pourrait croire.

Audrey ne tenait pas à lui dire que son épaule lui faisait mal, bien que le lieutenant se doutait que son collègue le savait.

Je suis sûr qu'on peut... répondit - il. D'ailleurs, la dernière fois que quelqu'un l'avait fait, ça lui avait valu 12 ans de prison. Cela dit, il savait qu'Audrey ne l'avait pas dit en rapport avec ça, donc n'en prit pas ombrage.

Oui, je suppose que je peux imaginer. Je n'ai jamais été à l'hôpital à proprement parler, cela dit , mais après tout, même la nuit, les patients ont besoin de soins et les médecins de les leur donner. D'ailleurs, heureusement qu'ils le font même si c'est en pleine nuit, sinon, ou irait - on ?

Reese réalisa ce qu'elle avait dit, innocement bien sûr, qui pouvait être mal pris :

Désolée, je n'avais pas pensé à ça...

Elle supposa que ce qu'il entendait par "ne pas être allé à l'hôpital à proprement parler" renvoyait au fait qu'il avait souvent été à l'infirmerie de la prison, en revanche... Puis, Audrey sourit quand il s'emballa à propos des soins médicaux :

Crews, tu te souviens de ce qu'on avait dit à propos des phrases courtes ?

Aucun problème, je sais...

Il se demanda cependant comment Reese, son équipière loyale et plutôt amicale avec lui et somme toute honnête, malgré quelques squelettes appelés "drogue et alcool" dans son placard, pouvait être la fille d'un des hommes qui avait magouillé pour l'envoyer en prison. La seule chose qui lui manquait dans l'équation et pas des moindres, était le rapport entre lui et Tom, son ami assassiné avec sa femme et son fils, crime pour lequel il avait payé, et ces hommes. Il savait que Jack Reese et 5 de ses collègues avaient volé l'argent d'un braquage de banque et avait menti quant au fait que la fille de son ami assassiné n'était pas chez elle le soir des meurtres... Donc cette fille savait qui était le vrai tueur.

Charlie se reconcentra sur ce que venait de dire Reese et répondit :

Je me souviens... Mais rien à faire, c'est trop difficile.

Elle fronça les sourcils :

Oui, j'ai remarqué que c'était très difficile pour toi... Dis - moi, je me trompe ou tu n'étais pas avec moi, il y a quelques secondes ?

Il lui avait semblé songeur, tout à coup, non pas que ce soit quelque chose d'inhabituel avec Charlie. Cela dit, Audrey fût interrompue par l'infirmière qui venait lui apporter son petit déjeuné. Pas vraiment bavarde, celle - ci déposa le plateau et souhaita "bonjour" et "bon appétit" à la patiente.

Oui... C'est une question de moment, je n'étais pas dans le moment présent...

Il pût échapper à la justification à cause de l'infirmière et du plateau repas.

Elle, elle a bien compris ta leçon sur les phrases courtes. dit Crews.

Si tu veux mon avis, elle a un peu trop compris cette leçon là et pas assez celle sur les patients qui n'ont qu'un bras disponible pour se redresser et pouvoir manger... commenta Audrey, commençant à bouger pour se mettre dans une position plus pratique pour manger.

Je suis toujours partant pour avoir ton avis... Enfin, la plupart du temps...

Il passa ses bras autour d'elle, l'aidant à se redresser, voyant arriver le moment où sa collègue ferait un mauvais mouvement et raviverait une douleur certainement déjà présente à son épaule.

Doucement, ne vas pas aggraver ton problème... Mais au fait, tu vas arriver à manger à une main ? ajouta - t'- il, pour mettre une sorte d'humour à la situation bizarre d'aider son équipière à se redresser.

Oui, j'ai déjà remarqué ça...

Elle le laissa l'aider à se redresser, de toute façon, ça valait mieux que de se faire mal mais dit, histoire d'avoir l'air de défendre sa dignité :

Merci... Crews, n'y pense même pas, le jour où tu devras m'aider à manger n'est pas arrivé et d'ailleurs, s'il arrive, achève - moi tout de suite.

Une fois que Reese fût mieux installée, il la libéra de son étreinte et dit :

D'accord, je tâcherai de me souvenir de ça...

Puis, il demanda, quelque chose lui venant à l'esprit :

Reese, tu penses que si ton co - équipier n'avait pas été moi, c'est toujours toi qui te serais retrouvée à témoigner ?

Merci, ce serait apprécié.

Elle avait commencé à jeter un oeil plus sérieux à ce qui lui servirait de petit déjeuné quand elle entendit la question de son partenaire et passa quelques secondes à resituer les "moi" et "toi" qu'il avait aligné, avant de comprendre le sens de son interrogation. Audrey attrapa sa main :

Ne dis pas ça, de toute façon, on ne peut pas changer la façon dont ces choses se sont produites. Et puis, je tiens à signaler que mon nom s'est retrouvé au plus proche de la liste des flics virés parce - qu'après une infiltration, j'ai fini junkie, tu peux me croire, ton dossier personnel mérite d'être mieux vu que le mien, au moins, toi, tu es innocent. Si un procureur ou n'importe qui d'autre a un doute en faisant la comparaison, je pense qu'il a un problème. Sans mentionner que je n'ai rien d'autre que mal à l'épaule, finalement, ce qui résulte de mon problème de drogue... Alors je m'amuse pas à aligner les blâmes contre ma personne, mais bon, j'assume d'avoir mal parce - que le soucis vient de moi, en aucun cas de toi. Tu ne viendrais pas ici aussi tôt le matin par culpabilité ?

Elle aurait préféré que ce soit par envie de la voir, parce - qu'en dehors de Marie, des amis et des proches, qui s'inquiétaient vraiment pour elle ce n'était pas ce qu'elle avait en plus grand nombre.

Je t'en prie.

Il fût un peu surpris qu'elle prenne sa main, mais c'était un geste assez banal de réconfort, dans le monde des gens libres :

Ca c'est vrai... D'accord, mais je dirais que ça n'est pas totalement de ta faute si tu t'es retrouvée embarquée dans la drogue suite à une infiltration, théoriquement, tu es surveillée dans ce genre de cas et si ça tourne mal, tu es sensée être sortie de là. Enfin, pour autant que je me souvienne de comment on procédait à mon époque... Et encore, ce ne sont pas des souvenirs, je ne l'ai pas vécu, c'est plus la façon dont les règles étaient... Non, ce n'est pas par culpabilité, je n'y avais pas pensé avant. C'est juste pour être sûr que tu te remettes. Au cas où tu n'as pas remarqué, les changements, ce n'est pas trop mon truc.

C'était le plus proche de "je viens parce - que je me soucie de toi" qu'il pouvait faire sans tomber dans le mélodrame.

Tu sais, ça ce n'est que de la théorie, ils ne nous sortent pas quand ça tourne mal, juste quand on a fini la mission, c'est seulement quand j'en suis venue à bout que quelqu'un s'est soucié de la désintoxication et de mettre mon nom en bas de la liste par la même occasion. D'accord, tant mieux, je préfère. Oui, d'ailleurs, temps qu'on parle changement, avant de cramer tout le matériel informatique ou je ne sais quelle catastrophe, si tu as un soucis dans la journée, tu m'appelles, je ne dormirai probablement plus et même si tu me réveilles, je n'aurais rien d'autre à faire que de me rendormir.

Elle avait compris le message sous - jacent de la visite de son collègue et avait retrouvé une meilleure humeur.

Charlie dit, avec un sourire :

Oui, je vois... Tu parles d'un remerciement. Je suppose que j'étais ta punition, non ? Parce - que je me suis bien dit que tu avais dû fâcher quelqu'un pour te retrouver avec moi. D'accord, donc si mon PC affiche un message bizarre, je t'appelle... Pareil pour mon téléphone portable, il y a encore deux/trois subtilités qui m'échappent avec ça.

Audrey sourit un peu aussi :

Oui... Oui, c'était un peu l'idée mais même si on ne se comprend pas et que j'ai pas toujours l'impression que tu es sur la même planète que moi, comme punition, je pense qu'on a vu pire. Oui, c'est l'idée !

Tu sais, je suis pourtant quasiment sûr qu'on est de la même planète mais quelque part, de façon différente. D'accord, je t'appelerai si besoin alors mais seulement si tu es sûre que ça ira si j'interrompais ton repos, tu as quand même été blessée par balle. rappela Charlie.

Je vais te laisser cette certitude... Rassure - toi, je m'en remettrai. En fait, je pense que je vais commencer à réfléchir à comment je peux me tirer de cet hôpital le plus rapidement possible. Et je pense que le plus embêtant, c'est d'être seule, donc à la limite, ça m'arrangera si tu m'appelles... Sauf si c'est pour me faire tes sorties à coup de phrases très longues.

Sinon, elle se préparait une journée d'ennui devant la TV.

Reese, s'ils te gardent, c'est qu'ils doivent contrôler un peu la blessure, ils ont leurs raisons. D'accord, de toute façon, si on n'a pas de nouvelles affaires, j'arriverai à repasser, en dehors de Ted, personne ne m'attend et on ne peut pas dire qu'il m'attende vraiment.

Il pouvait comprendre ce qu'était une longue journée à ne rien pouvoir faire de très exhaltant.

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